Frédéric Beigbeder, invité du Salon du livre du journalisme

Retrouvez ici l’essentiel de la rencontre avec Frédéric Beigbeder, auteur de Une vie sans fin

Animé par Joël Hakfin, directeur de La Boîte à livres.

LES ENJEUX

Le graal d’une course à l’éternité. À l’heure où nous rêvons pratiquement tous d’être des surhommes, Beigbeder nous invite à la quête la plus ancienne de l’histoire des romans et surtout des évangiles. Une poursuite de la vie née pratiquement en même temps que l’humanité. L’histoire ? Un présentateur qui télé décide de tout quitter car il approche la cinquantaine et que, tout d’un coup, le problème de la fin de la vie lui titille l’esprit. L’enjeu premier de ce livre est de répondre à une question simple : est-ce vrai que la science approche de réaliser le rêve de l’immortalité ? 


CE QU’IL A DIT

Frédéric Beigbeder : « Le héros de mon livre est journaliste. Moi-même je le suis mais personne ne le sait. Cela fait presque 30 ans que j’écris, à la radio, à la télévision. Je n’ai pas de carte de presse. Je ne me sens pas journaliste mais j’en fais. Mais suis-je utile ? Et après mûre réflexion, je me rends compte que je fais du journalisme totalement inutile. 

Oscar Wilde disait : « Le journalisme est illisible et la littérature n’est pas lue. » Le journalisme que je pratique, c’est celui qui créé des émotions, qui fait rire et pleurer, se poser des questions. Celui d’Ernest Hemingway, où chaque phrase contient une info, c’est le journalisme que l’on aimerait tous pratiquer. Angles bizarroïdes pour parler du monde.

C’est vrai que dans Une vie sans fin, le personnage s’appelle Frédéric Beigbeder. Mais ce n’est pas moi. Dans mes livres précédents, je mettais d’autres noms, mais on me rapprochait de parler de moi. Maintenant j’assume. C’est un peu comme un type qui raconte sa vie dans un bar. « Je suis un mensonge qui dit toujours la vérité », disait Cocteau. On est tous mythomanes, nous les écrivains, pas les journalistes, attention ! Mais lorsque l’on écrit des romans, on est forcément plus libres. On a la possibilité de se laisser embarquer, sans se limiter. 

Je suis le contraire de la mode, j’aime les personnages prétentieux, antipathiques, les looseurs. Des vrais connards quoi. Regardez, le présentateur télé… Il est imbuvable mais au cours de sa poursuite de vie éternelle, il se rend compte qu’avec choses simples, qui ne coutent pas cher, comme des rencontres, ou simplement de l’amour, le destin ne se trouve pas que dans notre ADN, mais peut-être simplement autour de soi. 

 Pour ou contre une vie éternelle ? Je ne le savais pas très bien quand j’écrivais mon roman. Il y a beaucoup de choses bien faites dans la nature, mais il faut avouer que ce truc de nous rendre mortel, c’état un peu salaud. « Je ne veux plus mourir ». J’ai failli appeler mon livre comme cela. Mon éditeur trouvait ça trop pessimiste. C’est du marketing quoi. J’ai expérimenté beaucoup de choses pendant la rédaction de Une vie sans fin. Je crois que le point commun entre journaliste et romancier c’est de secouer les lecteurs, réveiller les consciences : si le public ne réagit pas, on a pas fait notre boulot. »

 

À RETENIR

 Aujourd’hui, beaucoup de scientifiques soutiennent et poursuivent des projets fous. Ils passent leurs vies entières à chercher ce qui pourrait nous permettre de continuer à vivre, sans jamais se préoccuper de la mort, de la fin. « Le problème de la vie éternelle, c’est qu’elle a besoin de cambrioler le corps d’autrui », note Frédéric Beigbeder. Cette vie éternelle que l’on nous vend, c’est fantastique, mais c’est c’est surtout dangereux. Et le roman de Frédéric Beigbeder, Une vie sans fin, sonne comme une provocation qui permet de réfléchir. A-t-on peur de la mort ou trouvons-nous ça génial ? Pour l’écrivain, la question est de savoir si l’on croit encore assez en l’humanité et en ses défauts, ou si l’on est sûrs de vouloir d’une société éternelle, où tout le monde est lisse et beau.


Clara Gaillot