Ariane Chemin, La Communauté
Ariane Chemin est venue présenter son livre La Communauté. Photo : Clara Gaillot.

Retrouvez l’essentiel de la rencontre avec Ariane Chemin, auteure de La Communauté aux Éditions Albin Michel.

Animé par Nathalie Saint-Cricq journaliste à France Télévisions.

LES ENJEUX

La Communauté raconte l’histoire de la ville de Trappes, une ville pauvre de la banlieue parisienne mais une ville qui a aussi vu naître de nombreuses personnalités françaises. Aujourd’hui, la ville est confrontée au problème de la radicalisation. Venir de Trappes n’est pas vu d’un bon œil et s’accompagne de clichés, de méfiance. Raphaëlle Bacqué et Ariane Chemin ont voulu raconter soixante ans d’histoire de Trappes, en rencontrant les principaux acteurs de la ville.

CE QU’ELLE A DIT

Ariane Chemin : « Raphaëlle et moi on est à la fois complices, voisines de bureau, amies. En période d’élection présidentielle, on aime bien écrire un livre toutes les deux. En général, on a l’habitude de sortir des livres purement politiques. Mais cette année on voulait faire autre chose. On s’est rendu compte que le sujet de la religion faisait son retour dans les conversations. Ce qui nous passionnait aussi c’était l’immigration, la rénovation urbaine, l’éducation. On a cherché une ville qui rassemblait tous les problèmes qui se posent à la France aujourd’hui.

Trappes c’est une ville très enclavée, dans un département très riche. Elle concentrait un nombre de personnalité appréciées des Français (Jamel Debbouze, Omar Sy, Benoit Hamon, La Fouine…). On y a passé un an pour la raconter, raconter soixante ans d’une ville. Ce qui nous a le plus frappé c’est que les gens projettent énormément de fantasmes sur les banlieues et la religion. C’est vraiment un sujet particulier. Même la réception de ce livre a été un sujet en soi. On nous a reproché de ne pas proposer de solutions. Mais nous on voulait juste raconter sans jugement de valeur. Les réussites de Trappes sont exceptionnelles aussi. C’est la réussite du communisme municipal d’ailleurs car ça a mis en place des structures pour aider des personnes à émerger. Mais dès les années 1990, la rénovation urbaine ne fonctionne pas et les associations disparaissent.

On ne peut pas raconter Trappes si on ne remonte pas aux années 1950 pour voir les erreurs qui ont été faites. Dans cette ville, les parents et les grands-parents n’aiment pas raconter leur histoire. Il y a tout eu à Trappes. On a raconté l’arrivée des anciens du Groupe islamique armé (GIA) qui ont fui l’Algérie, l’arrivée des Frères musulmans qui voulaient une mosquée, l’arrivée des salafistes beaucoup plus tard… À Trappes on peut vraiment raconter ces étapes d’un retour de l’islam dans une ville. Mais ce qui est compliqué c’est de le raconter sans faire d’amalgames, en laissant bien entendre que les salafistes n’étaient pas la communauté musulmane.

Cette ville est très fermée sur elle-même et le maire se bat pour la réputation de sa ville. Il ne veut pas faire la Une des journaux. On s’est alors heurté à une sorte de déni. Le maire ne pouvait pas prononcer le mot religion et le nombre de gens partis de cette ville faire le jihad.

Nous on pense qu’il faut parler de la banlieue comme n’importe quelle ville. On n’a eu aucun problème, ou presque, pour voir tout le monde au final. On a mis du temps mais on a vu tout le monde et on a été très bien accueillies. C’est aussi l’avantage de la presse écrite, c’est plus discret et on a vraiment le temps. Le seul petit problème c’est que la mairie n’a pas voulu qu’on aille présenter le livre à Trappes. »

À RETENIR

Un travail d’enquête complet ressort de l’année passée à Trappes pour Raphaëlle Bacqué et Ariane Chemin. La ville concentre aujourd’hui tous les problèmes des villes de banlieues. La religion bien implantée dans la ville est source d’inquiétudes pour ceux qui ne connaissent pas la ville. Le livre des deux journalistes permet d’y voir plus clair sur la réalité d’une cité enclavée, dans un département pourtant riche.

Margaux Dussaud