Le calepin et le stylo, Rémy Buisine n’en a pas besoin. Le journaliste révélé sur Périscope a choisi le smartphone pour des vidéos sans filtre, diffusées sur le média Brut.

Rémy Buisine : « Un soir, j’ai filmé pendant cinq heures et demie. » Photo : Hakim Douliba

« Je ne sais jamais quand et où mes journées vont se terminer », raconte Rémy Buisine, amusé. Toujours en mouvement, le téléphone à la main pour filmer l’actualité en direct. « Il y a quelques jours j’étais en route pour la visite de Fillon au salon de l’agriculture, et je me suis retrouvé dans son QG pour la réunion que personne n’attendait. » A 26 ans, Rémy Buisine est omniprésent sur la toile et est même devenu l’icône de Brut, un nouveau média d’information vidéo lancé en novembre 2016 et présent uniquement les réseaux sociaux.
Un portable dans chaque main : l’un pour filmer en live l’actualité, l’autre pour s’informer et recevoir des précisions sur l’événement. Si vous le cherchez, il est probablement dans une manifestation, un rassemblement politique ou en pleine interview en live sur Facebook Brut. Aucune post-production ne se rajoute à son travail. « Il est tout le temps en train de filmer donc difficilement joignable, même pour moi », s’amuse Laurent Lucas, directeur éditorial de Brut.

Nuit debout, le déclic

Son crédo : s’inspirer du rythme des chaînes d’info en continu tout en y ajoutant des commentaires personnels. « Je ne suis pas dans l’analyse. Le flux d’images que je donne c’est un peu mon regard à moi. Le téléphone est devant moi et ce que vous voyez c’est ce que je vois aussi. » Constamment en direct, il n’hésite pas à contextualiser ses images en parlant pour les internautes qui arrivent en court de live.
Autodidacte, il a appris sur le terrain ces nouveaux formats journalistiques. Avant d’être embauché par Brut, il était community manager pour une radio.
C’est à Nuit debout que son aventure de cinéaste a commencé. Il y a un an, sur son temps libre, il filmait le mouvement né de la contestation de la loi travail, via Périscope. « Cet événement m’a fait avancer professionnellement et personnellement, se souvient-il. Un soir, j’ai filmé pendant cinq heures et demie non-stop, avec des pics de 80 000 personnes qui me suivaient en direct. » Mais il n’avait pas prévu de rester aussi longtemps derrière son écran. Rémy a passé un « appel solennel » pour continuer de filmer. Les batteries de son téléphone étaient à plat. « Il y a plein de gens qui m’ont ramené des batteries rechargeables et pour certains même à manger, à boire. » L’humain et la dimension collaborative qui se cache derrière le live, c’est avant tout ce qui passionne le journaliste.
Une ascension rapide pour le jeune nordiste. « En 2012, je suivais les présidentielles depuis mon canapé dans mon village perdu dans le Nord de la France », se rappelle Rémy Buisine.

Jamais sans ses batteries

Comment décrit-il ses portables ? « Indispensables, indissociables ». Et puisque les lives peuvent durer des heures, Brut a dû investir : « J’ai deux batteries externes qui me permettent généralement de tenir toute la journée. »
Rémy Buisine ne lâcherait son téléphone pour rien au monde. Il a encore de beaux directs devant lui. Dans dix ans, il espère travailler toujours sur des formats journalistiques novateurs. « En 2007 on ne savait pas qu’il y aurait le livestream aujourd’hui. C’est dur de se projeter et d’imaginer ce qui existera dans une dizaine d’années. »

Laura Bannier et Lucie Martin