Sortie(s) de secours, Caroline LangladeCaroline Langlade et Caroline de Juglart ont présenté leurs ouvrages autour de Christian Panvert. Photo : Clara Gaillot

Retrouvez l’essentiel de la rencontre avec Caroline Langalde pour Sortie(s) de secours (2017) aux Éditions Robert Laffont et Caroline de Juglart pour Patron du Raid (2017) aux Éditions Mareuil. .

 Animée par Christian Panvert, journaliste à RTL.

LES ENJEUX

Comment se remettre d’un événement terrible comme les attentats du 13 novembre 2015 ? C’est la question à laquelle tentent de répondre Caroline Langlade, ancienne journaliste, auteure et rescapée du drame du Bataclan. Caroline de Juglart s’est entretenue avec Jean-Michel Fauvergue, commandant du Raid de 2013 à 2017, à propos de son travail et des attentats de novembre 2015. Les deux auteures exposent deux points de vue d’une soirée d’horreur et en racontent les détails parfois drôles, sombres ou choquants.


CE QU’ILS ONT DIT

Caroline Langlade : « L’ambiance au Bataclan ce soir là est un microcosme poussé à son paroxysme. Il fait extrêmement chaud, les gens se déshabillent, beaucoup d’entre eux sont ivres. À ce moment là, on est juste humain, il n’y a de la place pour rien d’autre, il n’existe plus aucun filtre. C’est un huis clos terrible de trois heures trente que j’ai raconté. Ce qui m’intéresse depuis le début c’est l’après, comment vivre avec ça. Mais pour parler de l’après, il faut parler de l’avant. Il fallait donc que je parle de ce que j’ai vécu pour que les gens comprennent ce qu’il se passe après, donc aujourd’hui. Après, il faut apprendre à se reconstruire, à être patient, il ne faut pas être trop dur avec soi-même. Il existe des questions taboues pour les victimes. 

Nous sommes en état de stress et de vigilance permanent. Pour ma part, j’ai également des blessures invisibles liées au stress. Mon poids a beaucoup changé, j’ai failli perdre la vue et ma sexualité est très compliquée à gérer. Plusieurs autres victimes sont mortes depuis, soit de crises cardiaques sans antécédents, soit parce qu’ils se sont suicidés à cause du stress post-traumatique.
Je suis rentrée chez moi le soir même, après avoir subi des tirs et des explosions, sans voir de médecin. Nous avons été triés le soir même. C’est normal car la vie de gens était menacée à ce moment. Mais il n’est pas normal d’avoir été abandonnée dans un parcours du combattant médical.

La relation avec la presse est très compliquée pour les victimes. Il est très complexe de témoigner vite pour les victimes après les attentats. Ils ont besoin de temps. Le lendemain matin, à 8 heures, j’ai reçu des messages de mon ancienne supérieure de la rédaction de VSD qui m’a dit qu’il ne fallait pas que je sois égoïste et que je témoigne. »


Caroline de Juglart
: « Les journalistes n’en sont pas tous sortis indemnes. Surtout pour une génération jeune qui n’a jamais eu l’occasion de vivre ce genre d’expérience violente. J’ai rencontré Jean-Michel Fauvergue avant les attentats. Il voulait parler de son expérience au RAID, de sa passion. 
Les cadres du RAID étaient ce soir là chez leur patron. Ils reçoivent tous des SMS en même temps -ce qui n’est jamais bon signe. De leur initiative, ils sont partis à l’unité centrale de l’unité d’élite. Les rumeurs et les informations sont à ce moment là complexes à gérer. Il faut savoir que c’est la BRI qui a la main sur les interventions à Paris. Mais c’est de sa propre initiative que le RAID est intervenu. Cette unité est le bras armé de la police nationale. Il intervient dans des situations de crises. Ce n’est pas juste des tueurs, ils sont là avant tout pour désamorcer la crise, ce sont de grands connaisseurs de la psychologie. Jean-Michel Fauvergue a beaucoup débriefé les attentas d’avant sa prise de fonction, comme celui de Mohamed Merah. Aujourd’hui, il estime que face aux kamikazes, la négociation n’est pas possible.

Quand Jean-Michel Fauvergue arrive au Bataclan, personne ne s’attend à ce massacre. Ils ne comprennent pas la possibilité même de cette violence. Le patron du RAID est en retrait et gère ses hommes. Il a envie de partir, et pense à ses vacances d’enfance à la montagne, chez ses grand-parents. Il dit que cela lui a permis de se restructurer mentalement. »


À RETENIR

Les deux ouvrages racontent l’histoire d’un événement majeur dans l’histoire immédiate du pays. Ils permettent de vivre l’événement depuis plusieurs points de vue : ceux des victimes et des policiers. Il est impossible de prendre pleinement la mesure des effets qu’ont ce genre d’événements sur des hommes et des femmes. Mais ces deux livres permettent d’en apprendre plus sur la nature humaine et notre comportement, qui change de manière radicale, parfois grotesque et hilarante, lors d’une crise de l’ampleur des massacres du 13 novembre 2015.

 

Hugo Vallas