Quelle formation pour le service public

Quelle indépendance pour l’information du service public ? Photo : Malvina Raud

Retrouvez l’essentiel de la conférence « Quelle information pour le service public ? »

Animé par Nicolas Jacobs, médiateur de l’information nationale de France Télévisions, avec Albéric de Gouville, rédacteur en chef à France 24 ; Jean-Pierre Jacqmin, directeur de l’information et des sports de la RTBF ; Manuel Tissier, journaliste à Complément d’Enquête, vice-président de la Société des Journalistes (SDJ) de France 2 ; Frédéric Métézeau, journaliste à France Inter ; Francis Orny, délégué à l’antenne et aux programmes de France 3 Centre-Val de Loire.

LES ENJEUX

Et si l’audiovisuel public était sur le point d’être réformé en profondeur ? C’est en tout cas ce qu’a annoncé le gouvernement il y a peu de temps. Pour éviter d’être mis à mal, les journalistes du service public défendent la spécificité de leur mission. L’indépendance est le maître-mot du service public, qui se distingue des autres médias privés, propriétés, parfois, de milliardaires. Le thème de ce débat est plus d’actualité que jamais. 

CE QU’ILS ONT DIT

Albéric de Gouville : « La création de France 24 en 2006 était à l’origine un partenariat public-privé. C’est aujourd’hui totalement public. Quand il y a des projets de réduction de budget pour le service public, ce sont les rédactions les premières victimes. C’est la seule pression sur les rédactions que l’on connaît. On sait tous la responsabilité qu’il y a sur nos épaules. Nous ne sommes pas “la voix de la France”, mais nous sommes très responsables. »

Jean-Pierre Jacqmin : « Dans le service public, nous avons d’autant plus le devoir de travailler avec sérieux. Nous avons l’obligation intrinsèque de sérieux supplémentaire. La RTBF a revu sa façon de fonctionner. On crée un département des médias, en tuant le silo télé et celui de la radio. Il faut tout partager. C’est ce qui nous donne plus d’efficacité. En Belgique, le leader du parti au pouvoir a menacé de “vendre la RTBF”, après que certains sujets de la rédaction l’ont dérangé. Mais il n’en a pas le pouvoir. »

Frédéric Métézeau : « Il ne faut pas se limiter au service public comme étant le secteur public, celui de la redevance. Il ne faut pas se construire face aux médias privés. Nous sommes tous confrères. Nos points forts sont ceux de l’information locale, dense et de qualité. L’investigation est devenue essentielle. Les longs formats sont aussi une fierté des journalistes du service public. La relation forte avec le public aussi. Elle est entretenue par des médiateurs, à France Télévisions comme à la Maison de la radio. La pression aujourd’hui réside dans le silence des interlocuteurs. Ou pire : la communication. »

Francis Orny : « Les politiques ont évolué par rapport à nous. Ils pouvaient, avant, se servir de l’info locale pour passer leurs messages. Aujourd’hui, ils ne s’intéressent à nous que pour les élections locales. Le personnel politique ne supporte pas que les journalistes locaux fassent de l’investigation. Alors que le local est une école de formation très particulière. »

Manuel Tissier : « Il y a des points communs entre les journalistes. Mais ce qui est singulier, c’est le modèle économique. Qui produit l’information audiovisuelle ? Des industriels notamment. Le service public se distingue là-dessus. On en est fier, nos rédacteurs en chef sont conscients qu’on veut produire de l’information illimitée dans les propositions. Il y a un marqueur très fort de l’information de service public. Les pressions en interne peuvent exister mais la vigilance citoyenne doit alors être relayée par le corps journalistique. »

Nicolas Jacobs : « Je reçois près de 30 000 courriels par an. La majorité des courriels des téléspectateurs porte sur la notion de service public. Certains sont mécontents, d’autres sont reconnaissants. On nous prend souvent pour les derniers vigiles de l’intérêt public. Le service public doit plus répondre à la demande qu’à l’offre. Il n’y a pas de service public sans public. »

À RETENIR

« C’est une bien belle notion que celle du service public », a dit Nicolas Jacobs au début de la conférence. Seulement, les médias du service public sont parfois menacés par les pressions des hommes et femmes politiques. Le pouvoir politique pense trop souvent qu’il peut s’emparer de ces rédactions. C’est aux demandes du public que doivent répondre les rédactions, d’après tous ces journalistes. C’est pourquoi, durant cet atelier, le temps de parole accordé à l’assistance était particulièrement long. Un temps nécessaire pour échanger avec les journalistes du service public.

Clément Buzalka