Animé par Romain Hugon de l’Union des clubs de la presse de France et francophone (UCP2F) avec Françoise David (cheffe du service région de France 2), Jacques Trentesaux (co-fondateur de Médiacités), Frédéric Vézard (directeur adjoint des rédactions du Parisien/Aujourd’hui en France, en charge de l’édition nationale) et Stéphane Frachet (correspondant pigiste Les Échos/Le Parisien).

Faire vivre l'info locale au niveau national

Le rôle des correspondants locaux est déterminant dans le lien entre local et national. Photo : Clara Gaillot.

LES ENJEUX

Pour l’une des premières conférences de ces assises du journalisme à Tours, il était question de l’information locale au niveau national. « Vivre » au lieu-dit est tout l’enjeu de l’information locale. Pour intéresser les rédactions nationales, il faut se faire entendre. Que les médias nationaux aient des bureaux en région, des correspondants ou des pigistes, l’enjeu est le même : ne pas faire de l’actualité parisiano-parisienne mais bel et bien parler des régions. Une mission parfois difficile pour les acteurs locaux. Pour les rédactions nationales, la hiérarchisation de l’information questionne la pertinence d’un fait local et de de savoir s’il peut prétendre à un intérêt national.

CE QU’ILS ONT DIT

Françoise David  : « Pour le choix des sujets, les éditions nationales fonctionnent avec un système de double ascenseur. Le national passe des commandes sur certaines informations et les bureaux locaux font également remonter des informations qui peuvent avoir une résonance nationale. Nous ne pouvons pas nous contenter d’une toute petite histoire, sauf si c’est vraiment insolite. On essaie de tirer du terrain et de nos correspondants des illustrations et des enseignements sur des thématiques comme l’emploi, l’agriculture ou la société. Entre les bureaux de France Télévisions et Paris, c’est un échange permanent. »

Jacques Trentesaux  : « L’économie de la presse engendre un dysfonctionnement, et il s’aggrave. Le réseau des correspondants locaux se fragilise et les grands journaux font de plus en plus appel aux pigistes, un statut particulièrement précaire. Pour nous, la France ne se résume pas à Paris et notre credo reste l’investigation au niveau local. Il y a peu de correspondants en région même si nous croisons de temps en temps France 3 ou d’autres rédactions locales. Actuellement, les médias font comme si tout se passait à Paris. Nous, nous tournons le dos à cela en nous consacrant aux régions. Dans chaque ville, nous avons sélectionné des journalistes locaux pour en faire notre force vive afin d’appuyer notre marque qui est d’envergure nationale. Mais notre cible reste les lecteurs locaux. »

Frédéric Vézard  : « L’utilisation des correspondants, comme lors de la dernière présidentielle, est pour nous très importante. Nous avions innové en annonçant que nous n’utiliserions plus de sondage et nous avons mis en place un camping-car qui a sillonné toute la France lors de la campagne présidentielle. Au Parisien il y a deux types d’info locale, l’info île-de-France produite par les 120 journalistes, et l’info région qui remonte par nos 29 correspondants. Tous les correspondants peuvent faire des propositions via un Google doc, ils ont la parole. »

Stéphane Frachet  : « Les correspondants des Échos ont accès à toutes les rubriques, ce qui est mon cas. Mais il y a des exceptions, comme l’architecture et l’urbanisme par exemple, car la rubricarde ne souhaite pas ouvrir ses pages. Évidemment il y a une dichotomie entre les journalistes locaux et parisiens. Souvent, c’est compliqué quand on est pigiste de pouvoir se donner du temps pour donner du relief à une information. Il y a aussi une forte demande des acteurs locaux pour faire parler d’eux. Le correspondant régional est souvent vu comme celui qui va parler d’eux. Évidemment, on ne se fait pas que des amis ! »

À RETENIR

L’information locale au niveau national est un enjeu toujours aussi important dans le paysage journalistique français. L’habituelle opposition entre Paris et les régions n’est pas nouvelle et des médias se créent et se développent en province, alors qu’en même temps les postes de correspondants régionaux sont de plus en plus rares et parfois précaires lorsqu’ils sont pigistes. Une conférence qui pourrait se tenir à nouveau dans 10 ans…

Thomas Cuny