Ce débat d’ouverture était animé par Hamida El Bour, la directrice de l’Institut de presse et des sciences de l’information de Tunis (IPSI) et Taoufik Mjaied, journaliste et présentateur à France 24. Photo : Ewen Renou

Alors que la première conférence de ces Assises devait porter sur l’utilité du journalisme, elle s’est très rapidement orientée sur la protection et la sécurité des journalistes. Une problématique notamment alimentée par l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi.

Tués, disparus, emprisonnés, entravés. Chaque année, des centaines de journalistes partent sur le terrain, souvent en zones de conflits, au nom du droit à l’information. Ils prennent des risques et se mettent parfois inévitablement en danger. Pourtant d’utilité publique, la profession de journaliste fait toujours l’objet de menaces et de pressions multiples. Mais à l’heure actuelle, quelles mesures sont mises en place par les médias employeurs pour éviter que leurs journalistes ne soient tués ? Comment peut-on lutter efficacement contre ce danger permanent ?

« Il ne faut oublier personne »

Lors de ce premier débat, les intervenants étaient unanimes : les journalistes ont besoin d’une protection plus effective et leurs disparitions devraient être plus médiatisées. « Il faut arrêter de banaliser les questions d’assassinats de journalistes sous l’autel d’hommes politiques ou autres, et au détriment de la profession, a souligné Madiambal Diagne, président de l’Union de la presse francophone. Aujourd’hui, l’affaire Khashoggi est connue de tous et c’est très bien, mais il ne faut oublier personne, comme nos confrères tunisiens, actuellement disparus en Libye. » 

Pour Marc Saikali, journaliste franco-libanais et directeur de France 24, présent lors de cette interaction, cette meilleure protection implique une formation spécifique des journalistes. Il a d’ailleurs évoqué ce qui a été mis en place dans sa rédaction et à France Télévisions : « Aujourd’hui, on propose des formations très spécifiques sur les réflexes à avoir lorsque l’on part sur le terrain. On apprend à nos reporters à se défendre, à vérifier certains détails lorsque l’on rencontre un nouvel interlocuteur ». Des initiatives saluées par les professionnels, qui souhaiteraient leur développement à l’international, pour tous les journalistes.

Une justice pour les journalistes

Si, pendant cette conférence, beaucoup de journalistes ont donné leur avis sur le sujet, d’autres interventions du public ont été remarquées. Parmi elles, l’histoire d’un homme tunisien, Maaouia Chourabi, dont le fils journaliste, Sofien Chourabi, a disparu « il y a quatre ans, deux mois et quatre jours » en Libye. Militant lors de la révolution de 2011, son fils s’est battu pour défendre la liberté d’expression et de la presse. Maaouia Chourabi et sa famille ont beaucoup souffert de cette disparition brutale, à laquelle ils n’ont toujours pas d’explication. « En quatre ans, nous n’avons jamais eu une information complète et vraie. Nous ne savons pas si il est décédé ou retenu quelque part. Tout ce qui nous parvient ne sont que des rumeurs et des suppositions », a-t-il expliqué. Selon ce père, c’est l’absence de l’État tunisien et des médias sur le sujet qui empêche les recherches d’avancer. Déterminé à trouver la vérité sur son fils, Maaouia Chourabi milite pour que son histoire soit entendue et qu’elle déclenche une prise de conscience en Tunisie.

Assurer la sécurité et le bon déroulement des missions des journalistes est donc l’un des sujets phares de ces Assises de Tunis. L’idée d’une pétition pour la libération des journalistes détenus sur le continent africain a même été évoquée à la fin du débat : « Nous ne pouvons pas sortir de la salle sans faire de pétition pour la libération des journalistes disparus. Soyons efficaces puisque nous sommes journalistes. Nous sommes 500, nous devons la signer pour faire bouger les choses », s’est écrié un journaliste présent dans la salle.

Clara Gaillot


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