Marc Mentré est président de l’association Journalisme & citoyenneté, qui organise les Assises du journalisme et de l’information. Selon lui, cette 10e édition conciliera préoccupations professionnelles et thèmes grand public : de l’élection présidentielle au développement d’algorithmes producteurs d’information, des rencontres avec les auteurs, lors du Salon du livre de journalisme, au workshop consacré à Google…

Marc Mentré, ici pendant la conférence sur le financement des pure-players, lors de l’édition précédente des Assises du journalisme. Photo : Martin Esposito

Les Assises du journalisme fêtent cette année leur dixième anniversaire et leur deuxième édition à Tours. A quelles nouveautés faut-il s’attendre ?

La principale nouveauté est le thème retenu, qui doit nous permettre de nous projeter dans dix ans. Il sera question des médias, du métier de journaliste, de comment nous informerons et comment nous nous informerons d’ici à 2027. Se poser une telle question est inédit aux Assises, car, lors des éditions précédentes, nous ne nous projetions que sur un an ou deux. Par ailleurs, les Assises vont connaître une évolution fondamentale : jusque là, elles étaient essentiellement un lieu de réflexion ; elles vont aussi devenir un lieu d’action. Un hackathon est ainsi organisé en partenariat avec Samsa, Google et Streetpress seront présents dans le cadre de workshops… Avec toujours cette volonté d’anticiper par rapport aux dix prochaines années.

Un salon du livre est également programmé. Ce n’est pas une première dans l’histoire des Assises. Réserve-t-il lui aussi des surprises ?

En effet, nous avons repensé notre Salon du livre. Comme nous envisageons d’ancrer l’organisation des Assises à Tours, nous avons noué des partenariats locaux, notamment avec La Boîte à Livres (une librairie tourangelle, NDLR). De plus, cette année, ce salon sera moins statique : des débats sont organisés, afin de faciliter les échanges entre les auteurs et leurs lecteurs. Globalement, nous cherchons à promouvoir des opportunités de rencontre avec les auteurs, ce qui n’est pas toujours possible avec les seules séances de dédicaces.

Ces nombreux débats et les autres occasions destinées à créer de la proximité entre les visiteurs et les professionnels invités semblent participer d’un même objectif : attirer le grand public vers les Assises...

Absolument. Nous aimerions même, lors de la prochaine édition, prolonger le Salon du livre jusqu’au samedi. Cela faciliterait entre autre l’ouverture au grand public. Dès cette édition, nous cherchons à attirer ce même public extérieur au journalisme. Même si les ateliers du matin sont destinés en priorité aux professionnels, du fait de leurs thématiques pointues, l’après-midi, la programmation se veut plus accessible, plus abordable.

Une des autres nouveautés de cette édition concerne le prix des Assises. Désormais, chacun peut voter pour le(s) journaliste(s) de l’année. Pourquoi avoir attendu dix ans pour prendre une telle initiative ?

Cette possibilité de voter s’inclue dans notre volonté – relativement récente – d’attirer le grand public. De plus, les travaux et les personnes nommés témoignent de cette proximité avec les citoyens. Je pense notamment au quotidien régional Nice Matin, pour leur travail suite à l’attentat du 14 juillet 2016. Le prix qui sera remis doit surtout récompenser les aspects novateurs et déontologiques du métier de journaliste.

En parallèle, plusieurs thèmes, comme celui du sport ou du photojournalisme, ne seront pas ou peu abordés, au profit de la présidentielle notamment…

C’est vrai, mais nous ne pouvons pas passer à côté de l’actualité politique nationale. Les Assises auront lieu à six semaines du premier tour de l’élection présidentielle. Il serait illogique de ne pas aborder cette question. C’est là encore une question de proximité avec le public. Mais cela ne va pas sans poser quelques problèmes. Par exemple, le jour de la conférence sur le journalisme politique, François Fillon est convoqué chez les juges pour être mis en examen. L’actualité se télescope avec notre planning.

Pour résumer, les Assises parleront du journalisme dans dix ans et l’élection présidentielle. La programmation des Assises étant très riche, avec près de 180 intervenants, un certain nombre de conférences ont lieu simultanément. Quels conseils donneriez-vous au visiteur hésitant ?

Personnellement, l’une des conférences que j’attends avec le plus d’impatience concerne « le libre arbitre face aux algorithmes », car elle traduit bien notre objectif d’anticipation. Elle soulève également plusieurs question primordiales : nous informerons-nous de la même manière ? la technique va-t-elle prendre le dessus sur le libre arbitre ? Ces questions doivent être abordées dès aujourd’hui. J’attends aussi la conférence du jeudi après-midi, sur le règne des communicants : Franck Louvrier, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy sera parmi les invités. C’est du lourd, si je peux me permettre ! Les conférences du matin, dont beaucoup ont lieu simultanément, c’est vrai, sont aussi très qualitatives. Le tout s’avère prometteur !

Propos recueillis par Martin Esposito